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Voici quelques bouquins pour vos vacances d'été :

Nathalie SKOWRONEK: "Un monde sur mesure". Le monde des tailleurs juifs issus des shtetls de Pologne. Puis des vendeurs de prêt-à-porter en Belgique et au Sentier. La disparition complète aujourd'hui de ce monde (la vraie fin du Yiddishland) avec l'apparition des grandes chaînes. Une histoire familiale passionnante avec cette question. comment exister sans renier ses origines ?


Arno GEIGER: "Autoportrait à l'hippopotame". Il y a une littérature autrichienne très riche (Jelinek, Handke, Bernhard) mais Arno Geiger (l'un des auteurs germanophones les plus lus dans le monde dont le best-seller est "Tout va bien") en est un représentant beaucoup moins sombre. Son oeuvre est même plein d'humour et de fantaisie. Il s'agit ici du roman de formation d'un jeune homme observant avec acuité toute son époque. Drôle et singulier.


Iouri TYNIANOV: "La mort du Vazir-Moukhtar". La réédition, directement en poche, d'une oeuvre totalement méconnue en France, publiée à la fin des années 30 en pleine terreur stalinienne. Un extraordinaire roman historique dont le héros est Alexandre Griboïedov, diplomate russe massacré à Téhéran en 1829. Un livre qui nous fait voyager à Saint-Pétersbourg, Moscou, les routes du Sud, Tiflis, Tabriz, Téhéran. La critique de l'absolutisme des Tsars est aussi une critique implicite de Staline. Un livre hors du commun.

Catherine MERRIDAL: "Lénine 1917 - Le train de la Révolution". Un livre passionnant, un vrai thriller, qui se concentre sur une période décisive de l'histoire, celle du voyage de Lénine en train, en avril 1917, depuis Zürich jusqu'à Saint-Pétersbourg via l'Allemagne, la Suède (et la ville-frontière d'Apparanda), la Finlande. C'est l'histoire du fameux wagon plombé. C'est aussi un portrait de Lénine très peu flatteur: ascète, obsessionnel, extrémiste. C'est surtout le rôle de l'Allemagne qui a inauguré la "guerre moderne" avec une tentative réussie de déstabilisation internationale. Semer l'anarchie en Russie avec Lénine pour pouvoir se concentrer sur le front Ouest.


Philippe TESSON: "Une très légère oscillation". Un journal intime, une suite de réflexions au fil du temps. Traversé par deux événements majeurs: la mort de sa mère et une chute, à l'automne 2014, du toit d'une maison où il failli laisser la vie. Je n'aime pas toujours Philippe Tesson (je ne partage ni sa vision de la Russie, ni son écologisme) mais ce bouquin là se picore avec plaisir. C'est percutant et ça évite agréablement les lieux communs.


Lorraine KALTENBACH: "Filles à papa". On peut évidemment penser qu'il s'agit d'un bouquin de midinette. Mais non, c'est une étourdissante galerie de portraits de femmes, toujours très justes et d'une grande acuité psychologique. Un reproche: c'est peut-être un peu trop concis mais est bien livrée, à chaque fois, une clé décisive.


Massimo MONTANARI. "La chère et l'esprit - Histoire de la culture alimentaire chrétienne". On a longtemps pensé que ce qui différenciait fondamentalement le christianisme du judaïsme et de l'Islam, c'est qu'il ne comportait aucun tabou alimentaire. Tout serait licite, peu importe ce que l'on mange. Ça demeure l'attitude générale en Europe même si les chrétiens sont de moins en moins nombreux. Pourtant, c'est plus compliqué que ça. Il y a quand même bien des règles alimentaires dans le christianisme et la culture européenne. rôle du pain et du vin, relation à la viande, au sang, au gras, modes culinaires, rôle du jeûne et aujourd'hui le véganisme, les banquets de saucisson, les marchés halal. Un livre passionnant: l'histoire de l'alimentation et du goût, c'est une histoire de la culture en général.


Velibor COLIC. "Jesus et Tito". La vie d'un adolescent en Bosnie-Herzégovine. Une réédition, en poche, d'un chef-d'oeuvre d'humour. Velibor Colic écrit maintenant directement en français. Une occasion de découvrir un grand écrivain. Son dernier bouquin "Manuel d'exil - Comment réussir son exil en 35 leçons" est formidable, je le rappelle.

Nicolas FARGUES - Iegor GRAN: "Ecrire à l'élastique". Un échange épistolaire entre deux amis, deux maîtres d'humour ravageur. Nicolas Fargues est surtout connu pour son livre "J'étais derrière toi" et Iegor Gran (d'origine russe) pour " L'écologie en bas de chez moi". Leur livre commun se passe entre Paris et la Nouvelle-Zélande. C'est délicieusement féroce.


Johan NORBERG: "Non, ce n'était pas mieux avant". A lire absolument par tous les déclinistes, passéistes, anti-capitalistes, insoumis, Pikettistes, alter-mondialistes, mélenchonistes, lepenistes. Contre toute évidence, la plupart des gens sont convaincus qu'on vivait mieux autrefois. Avec une grande pédagogie, en s'appuyant sur de multiples données chiffrées, Johan Norberg, un historien suédois, démontre qu'on vit bien mieux aujourd'hui qu'autrefois, pas seulement qu'il y a un ou deux siècles mais qu'il y a 10 ou 20 ans. niveau de vie, inégalités, espérance de vie, pollution, pauvreté, éducation, tout s'est beaucoup amélioré et les progrès sont continuels. Un livre revigorant qui vous redonne de l'optimisme.

Chris HEDGES: "La guerre est une force qui nous octroie du sens". "La guerre, c'est la culture de la mort. Elle commence par l'annihilation de l'autre. Elle finit par l'annihilation de soi." La guerre, on en fait toujours une analyse manichéenne et simpliste. On est souvent aussi aveugles et insensibles que certains de nos adversaires. On se croit alors autorisé à résoudre les conflits par la force; il faut plutôt essayer de comprendre la guerre pour s'en protéger. Un livre puissant et original (traduit par Nancy Huston), par un ancien correspondant du guerre du New-York Times (Balkans, Moyen-Orient, Afrique, Amérique Latine).


Tableaux du célèbre peintre britannique David HOCKNEY (né en 1937) auquel une exposition à Beaubourg est actuellement consacrée.


Les histoires d'amour finissent mal en général, dit-on !

C'est sûr mais pourquoi ?

Passé le premier moment d'émerveillement, qu'est-ce qui en vient à nous irriter, nous exaspérer, exacerber, dans l'autre ?

Ça dépend, sans doute, de chacun mais pour moi, c'est simple, c'est sa prévisibilité. Il n'y a pas pire tue-l'amour !


Quelqu'un que je décrypte, il ne m'intéresse plus. Et décrypter les gens, ça m'apparaît de plus en plus facile.

Tout simplement parce qu'on a, de plus en plus, des personnalités entièrement construites.

On se croit originaux, singuliers, mais, en fait, on n'épouse que les codes sociaux en vigueur.

Il y a, aujourd'hui, une banalisation générale pas seulement de la vie, mais des comportements, des modes de pensée.

En fait, on n'a pas d'autre ambition, en général, que de se conformer, sans même s'en rendre compte, aux injonctions sociales. On se croit, souvent, sophistiqués mais on cherche, plutôt, à se mettre, le plus vite possible, sur des rails. Ça se résume à mes études, mon boulot. La vie, l'avenir, on ne l'envisage pas en termes de rêves mais de projets. On a des plans !

Ma vie amoureuse, ça n'a jamais été satisfaisant. Je rencontre comme ça, surtout en France, plein de planificateurs. Des rêveurs, je crois que ça n'existe plus. Rien que des gens qui savent où ils vont, qui sont volontaires, déterminés. Des gens qui "pensent droit", d'un imperturbable sérieux.

C'est très bien parce que c'est rassurant mais est-ce que c'est vraiment ça qu'on recherche en amour. Une vie sans aspérités, stéréotypée, racornie, petite-bourgeoise. Des enfants hurleurs, des week-ends passés chez les beaux-parents ou chez des amis, dans leur maison de campagne, les vacances aux Seychelles, la semaine, enfermée dans son bureau, à s'éclater comme DAF ou Dircom. Quelle horreur, au secours !


J'en bâille tout de suite d'ennui. J'ai besoin de ne surtout pas savoir ce que je vais devenir dans un an, dans six mois. J'ai besoin d'espérer que ma vie peut bifurquer, prendre d'autres tours. Qu'il y a encore une part d'imprévu, de hasard, dans mon existence. Que tout peut changer. Pas seulement mes conditions matérielles mais moi-même: que je puisse devenir autre, choisir une nouvelle vie. Que je puisse changer de destin !

C'est ça qui est insupportable. une vie sans imprévu, sans hasard, sans transfiguration possible !


Halina TYMUSZ (prononcer timouch en accentuant sur le i). jeune artiste polonaise.


Un récent article du journal "Le Parisien" évoquant le harcèlement de rue dans le quartier de La Chapelle à Paris a suscité d'innombrables commentaires. C'est outré, excessif, rien que des propos indignés, extrêmes, partagés selon une logique binaire (de droite ou de gauche), allant de l'incompatibilité culturelle à la manipulation islamophobe.


Je me garderai bien d'avoir un avis tranché là-dessus d'autant plus que c'est trop en phase avec l'esprit féministe victimaire contemporain.

Mais il faut reconnaître qu'en France, fréquenter seule l'espace public (un café, un restaurant), n'est pas toujours évident. Ça contraste avec les pays d'Europe Centrale ou du Nord. Mais risque-t-on vraiment de sérieux ennuis. Non, évidemment. La France est, malgré tout, un pays sûr et on ne risque pas de s'y faire violer à chaque coin de rue, même à La Chapelle. Mais c'est vrai que la crainte du harcèlement freine les initiatives. C'est quand même bien une privation de liberté.


C'est fâcheux, c'est une pression insupportable. Quels qu'en soient les motifs (la bêtise, la frustration, la misère), le sexisme (de même que le racisme) est, évidemment, condamnable et il ne saurait trouver aucune excuse pas même celle d'être un déshérité, un exclu.

Est-il, pour autant, en progression. Est-ce que c'est vraiment pire qu'avant. Est-ce que c'est l'Islam ?

Impossible à dire bien sûr mais il est évident qu'il y a aussi, depuis quelques décennies, une tendance générale des femmes à s'habiller de manière de plus en plus discrète et décente. les jupes, les talons hauts, le maquillage, c'est en train de disparaître et ça n'a rien à voir avec le développement de l'islamisme. De plus en plus, on s'habille neutre, presque comme des mecs, et on a vite fait d'être jugée provocante aujourd'hui en France.


On est de plus en plus puritains, il faut le reconnaître. Ça concerne toutes les sphères de la société, pas seulement certaine catégories sociales ou religieuses.

On vit dans une autre époque caractérisée par le refus de la séduction, désormais, jugée triviale. Le refus de la séduction, c'est aussi refus de la différence des sexes. C'est la grande mutation du psychisme humain à laquelle nous assistons aujourd'hui. On serait homme ou femme par choix et non par destin.


L'indifférenciation, l'unisexe, c'est devenu notre rêve, notre grand fantasme, et ça trouve, en particulier, son expression dans la théorie du genre.

Bien sûr qu'il faut affirmer la stricte égalité de l'homme et de la femme; Mais être égaux ne veut pas dire qu'on est pareils. On se prive, aujourd'hui, du plaisir de la découverte de l'altérité et, finalement, on a moins de considération et de respect pour l'autre. Curieusement, les hommes et les femmes s'ignorent et se haïssent de plus en plus alors qu'on ne cesse d'affirmer leur absolue identité. Le ressentiment et la rancœur entre les sexes n'ont jamais été aussi forts.

Quoi qu'il en soit, il y a deux manifestations aux quelles j'accorde toute ma sympathie: la journée de la jupe et le mouvement pour que les femmes puissent se réapproprier les cafés.


Images de Natalie SHAU, jeune artiste digitale de Lituanie (Vilnius).

L'été, je n'aime pas du tout! La chaleur, la lumière, j'ai en horreur. Ma seule consolation, c'est qu'à partir du 21 juin, la durée des jours décline.

Un de mes lecteurs assidus, un Québecquois bien connu, Richard, m'a demandé, l'an dernier, des photos de mon petit jardin parisien.

J'ai beaucoup traîné parce qu'avouer, en France, qu'on a un petit jardin, dans Paris 17 ème, ça suscite, immédiatement, la haine et une effroyable jalousie. On se fait tout de suite traiter de "sale bobo". Mais est-ce qu'il ne faut pas, non plus, savoir s'affranchir de cette épouvantable logique.

Tant pis. J'ai choisi, aujourd'hui, de transgresser. J'ai conscience que ça peut apparaître odieux, arrogant, mais je peux aussi m'en expliquer.


Voici, donc, quelques images, donnant sur ma cuisine. En fait, je n'ai pas du tout la passion du jardinage. Je ne fais rien, je n'aime pas les travaux manuels. Je laisse donc tout pousser, au hasard, en complète anarchie: mon petit jardin, c'est, en fait, une véritable jungle. Je me suis, simplement, contentée de balancer quelques plantes mais ça a, curieusement, marché.


J'ai, quand même, une forte prédilection pour les arbres et fleurs japonais. Je suis fanatique d'hortensias (qui ne viennent pas de Bretagne, comme on le croit généralement, mais du Japon, depuis la fin du 19ème siècle), de camélias (idem) et d'érables japonais (qui deviennent tout rouges à l'automne).

Au total, les hortensias et les camélias, c'est mon grand amour. Il n'y a pas plus beau pour moi. Et c'est un lien singulier, méconnu, entre la France et le Japon. Parce que, pratiquement, on ne trouve des hortensias et des camélias que dans ces deux pays.

Photos de Carmilla Le Golem chez elle-même, en mars et en juin 2017 (pour les camélias puis pour les hortensias).

Le retour du religieux, c'est un thème à la mode mais je n'y crois pas trop. Ça plaît surtout aux déclinistes-catastrophistes et aux nostalgiques mais même la montée de l'Islam me laisse sceptique. On va tous devenir musulmans, dit-on! Ça fait très peur aujourd'hui. La solution, ce serait la "Soumission" (Houellebecq).

L'effondrement du christianisme, c'est évident. Petit exemple: c'est la Pentecôte aujourd'hui mais j'ai l'impression que presque plus personne, en France, ne sait à quoi correspond cette fête religieuse. Et d'ailleurs, on passe tout de suite pour un simple d'esprit si on dit qu'on adhère au christianisme.

Ça contraste certes avec certains pays d'Europe Centrale (la Pologne, l'Ukraine, la Russie) où les églises sont pleines à craquer mais, là-bas aussi, c'est en train de changer. Les jeunes se détournent massivement de l'église.

Non, non. le 21 ème siècle ne sera pas du tout religieux. Et même, dans un avenir très proche, j'ose le prédire, tout le monde, en Europe, sera, y compris chez les musulmans, sinon athée, du moins sceptique. C'est l'Islam qui se fondra dans l'Europe et non le contraire.

Tout ça parce qu'on a changé d'ère, qu'on est vraiment emporté par un mouvement irrépressible, celui de la démocratie, le nouveau moteur des sociétés humaines, contre le quel les religions ne peuvent pas faire grand chose.

Le religieux, ça va, en effet, bien au-delà des croyances et des pratiques individuelles. Ça a structuré la société politique jusqu'à une époque très récente. Mais aujourd'hui, c'est terminé. Les religions sont désormais hors du jeu politique.

Ça a commencé avec le christianisme mais la disparition prochaine du christianisme, est-ce qu'il faut la déplorer. Il a lui-même programmé sa propre mort: Il a été la "religion de la sortie de la religion" avec ses principes égalitaires, son refus des idoles et des boucs-émissaires. Il a préparé l'avènement de la société démocratique dans la quelle il trouve un peu son prolongement.

Tout a ainsi basculé il y a environ deux siècles avec la pensée des Lumières. On s'est mis à faire confiance au pouvoir de la raison et au libre choix de l'individu. L'Europe a, alors trouvé la logique de son développement: la démocratie et l'Histoire. "Plus rien n'a cours de ce qui justifiait la domination, la subordination, la dépendance".


Dieu a définitivement quitté le monde profane avec l'avènement de la société démocratique.


Les hommes viennent de se libérer mais il leur appartient désormais de se gouverner par eux-mêmes. On ne s'en rend pas bien compte mais une nouvelle ère s'ouvre: "l'histoire de la libération est derrière nous; l'histoire de la liberté commence" et elle commence parce que nous ne savons pas trop quoi en faire.


Ça explique, bien sûr, l'inquiétude, le malaise actuels.

Mais est-ce que ça justifie la peur, la "soumission" d'emblée acceptée ?

Pas du tout. L'esprit démocratique saura balayer, j'en suis sûre, l'Islam comme toutes les religions. Il ne vit aujourd'hui que ses derniers soubresauts.

La guerre des religions, c'est fini. Tout simplement parce que l'esprit démocratique est en train d'éjecter du champ politique les religions. Libre à vous, cependant, de continuer à croire en qui et à quoi vous voulez.


Tableaux de Gérard GAROUSTE (né en 1946).

Mes propos sont, bien sûr, inspirés (sans doute avec de multiples déformations) de l'oeuvre de Marcel Gauchet.